de but en blanc

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Quand on allume la lumière dans une pièce, on ne recense pas l’obscurité pour l’en extraire, petit à petit, patiemment. On n’étudie pas la qualité de l’obscurité ni ses propriétés physiques pour que la lumière puisse prendre sa place. La lumière emplit la pièce, de but en blanc, comme un miracle qui n’en est pas un puisque les miracles sont autre chose que ce que l’on dit, ils ont lieu tous les jours. Ceci bien évidemment pour dire que ce qui est lumineux n’est pas obscur. Il est pourtant des illuminations qui restent muettes. On est alors frappé de stupeur en considérant l’espace sidéral où se meuvent nos désirs qui ressemblent à des étoiles dans un ciel obscur et silencieux comme seul l’univers est silencieux.

de deux choses l’une

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Il se tenait droit comme un i. Le vent calme de septembre balayait ses doutes et il écoutait refluer une certitude. Elle prenait de la place dans la pièce connue. Pourquoi renoncer? Et pourquoi refuser? La vie attendrait-elle longtemps qu’il se décidât à acquiescer? Attendrait-elle longtemps qu’il se décidât à faire un pas un seul vers autre chose que soi? Il brassait le connu en oscillant comme un métronome, de l’inconnu au connu, du connu à l’inconnu, de l’inconnu au connu et ainsi de suite sans arrêt possible. Mais une mélodie infinie, sans son, sans début ni fin, allait son chemin qui était aussi le sien et elle l’enivrait, suprême inconnue qui l’attirait à elle.

l’invisible manifeste

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Comme elle songeait rêveuse que le pire était l’absurde et que l’absurde n’était pourtant pas ce qu’il y avait de pire puisque tout, exactement tout, était divin, elle esquissa un mouvement pour se détourner d’une pensée qui la ravissait en vain. Rien n’était dû, rien n’existait entre les êtres qui les obligeât à s’expliquer. Ils pouvaient s’exprimer puis se taire de même que les nuages passaient dans le ciel puis n’y passaient plus. Elle ne s’offensait pas de la pluie sous prétexte qu’elle avait été précédée du soleil. Pourquoi souffrait-elle que rien ne succédât à un élan?

la mer le mot

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Seule une aberration pouvait transformer ce monde insondable et merveilleux en un enchaînement absurde de gestes, de faits, de chapitres sans transitions, de narrations éternelles, de volumes, de tomes entassés les uns sur les autres. L’essentiel ne se saisissait pas avec les mots. L’intelligence devait épouser celle du coeur ou bien l’aridité aurait fini par épuiser un terrain potentiellement fertile. Il posait sa joue blanche contre le carreau de sa fenêtre close sur le monde. Il regardait la manifestation sans elle. La vie n’était ni sérieuse, ni légère, ni comique ni rien que l’on ait trouvé en ouvrant nonchalamment un dictionnaire et en laissant courir un miracle comme l’oeil sur des pages emplies de signes, en l’occurence, des mots. La vie n’était pas les mots et il rêvait d’un silence dévorant toute idée qu’il se fût faite sur exactement tout.

l’enfance de l’âme

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Il se tenait près de la fenêtre. Le printemps refluait comme la mer à ses tympans. Il ne se souvenait pas, il n’avait rien oublié – se souvenir lui était devenu inutile. Autant qu’un tiroir où mettre le printemps qui n’y serait jamais entré et qui y était déjà, comme partout autour. Sa main effleura le rebord, une autre la lui prit et il la lui laissa, longtemps, les yeux ouverts sur le même monde et sur la même cour béante sous le ciel. Comprendre, quoi? Qu’est-ce qui avait eu lieu et où? Le temps n’existait pas qui le séparait de cet instant, ni l’espace qu’il ne parcourait pourtant plus. La joie sans but qu’il éprouvait n’admettait pas de fin. Mais s’agissait-il de fin ou plus exactement, de commencement?