Il était une fois un extraterrestre. On l’a déjà dit mais c’était une autre fois et surtout, c’était un autre extraterrestre. Il ne décida pas de venir faire un petit tour sur Terre parce qu’il y était déjà passé, rapidement, un été durant sa tendre jeunesse, quand il n’avait pas 37895 ans. Il n’avait pas de souvenir particulier de la Terre, ni non plus ne sentait le besoin d’en avoir. Il avait étudié sa géographie universelle, voilà tout. D’autre part, la galaxie du Soleil était si loin… Il cogitait tranquillement à l’ombre d’une fougère géante en sirotant un extrait de musc particulièrement velouté. Parmi les très nombreux habitants de cette planète bleue comme une orange, habitants qu’il avait soigneusement étudié un à un et qui l’avaient émerveillé sinon stupéfait, il n’avait par contre jamais bien compris les humains. Les questions que l’étude de ces spécimens avait soulevées voletaient encore dans l’air à l’instant frais et rosé de la mi-journée. C’était sans doute le propre de ce peuple de faire des nœuds le matin pour pouvoir les défaire durant le reste de la journée et inversement, la nuit. D’une façon générale, cela occupait tout le temps qui leur était imparti sur Terre. En vérité, pensait-il, jamais je n’ai connu auparavant de potentiel incarné qui s’ignore autant et grandit dans l’aveuglement presque total, comme une jeune pousse courageuse sous un caillou immobile.